Focus sur le projet SequoIA – IA Cluster Confiance et Sécurité

Publié le 30/10/2024

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Le 22 mai 2024, Emmanuel Macron, président de la République, a annoncé la labellisation du projet SequoIA – IA Cluster Confiance et Sécurité, une initiative soutenue par un budget de 20 millions d’euros répartis sur cinq ans. Conçu pour compléter le projet TIARe (Toute l’Intelligence Artificielle à Rennes), SequoIA consolide la dynamique de longue date en faveur de l’excellence académique et scientifique des chercheurs de Rennes et de Bretagne. Ce projet ambitieux vise à faire de la Bretagne un leader européen de l’intelligence artificielle, en positionnant l’Université de Rennes et ses partenaires nationaux et européens comme des références en matière de confiance et de sécurité dans l’IA.

SequoIA est porté par l’Université de Rennes et piloté par Guillaume Gravier qui a accepté de répondre à nos questions. 

 

En quoi consiste le projet IA Cluster Sécurité, Confiance, IA ?

Le projet IA Cluster Sécurité, Confiance, IA vise à renforcer l’excellence académique en Bretagne sur des sujets fondamentaux et appliqués autour de l’IA de confiance, la sécurité de l’IA ou par l’IA.

Sur le plan des thématiques abordées, le cluster concentre ses forces sur trois piliers : les fondements d’une IA sûre, de confiance et maîtrisée, y compris dans ses usages et la dimension humaine et sociale ; l’IA pour la cybersécurité et la défense, regroupant toutes les problématiques de sécurité des systèmes d’IA et de sécurité par l’IA des systèmes informatiques mais aussi des problématiques de protection de l’information (lutte contre la propagande par exemple) et de collecte de l’information ; l’IA pour l’observation et la modélisation de la terre et de l’océan, avec un focus sur l’imagerie satellitaire et sur les jumeaux numériques de l’océan, avec des applications sur la sécurité environnemental et la lutte contre le réchauffement climatique.

Sur l’ensemble de ces thématiques, le projet vise à renforcer l’excellence de la recherche académique, de la formation au niveau master et doctorat, en synergie avec l’écosystème d’innovation et les entreprises présentes sur ces domaines, le tout dans un contexte européen, voire international. Le consortium, porté par l’Université de Rennes, regroupe l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur et de recherche présents en Bretagne, les organismes de recherche (CNRS, Ifremer, Inria) et quelques acteurs emblématiques de l’innovation. Il s’appuie sur des laboratoires de recherche d’envergure internationale dans lesquels ces établissements sont impliqués, au premier plan desquels l’IRISA et le Lab-STICC.

De nombreux partenaires — collectivités, agences nationales, entreprises de toutes tailles, pôles de compétitivité — sont associés au consortium pour renforcer l’attractivité de la recherche, l’adéquation de l’offre de formation aux besoins des partenaires, le potentiel d’innovation par l’IA chez les partenaires. On peut bien sûr citer les grands groupes comme Orange, EDF, Thales, Airbus ou encore Naval Group, mais aussi de nombreuses PME du domaine de la cybersécurité ou de l’environnement. Ou encore la DGA, le SHOM ou l’ANSSI pour les agences. Les pôles de compétitivité, notamment Images & Réseaux, sont également partenaires du projet pour renforcer le lien entre recherche académique et innovation. Sans oublier les collectivités avec un soutien fort de la région Bretagne au projet.

Que signifie la labellisation IA-Cluster et comment cette reconnaissance impacte-t-elle le projet ?

La labellisation IA Cluster vient avant tout reconnaître la force et le dynamisme de notre écosystème sur les thématiques mises en avant par le projet. Et cela est valable tant pour l’écosystème académique (en IA, en cybersécurité, en sciences de l’environnement et de l’océan) que l’écosystème d’innovation. Le soutien des entreprises, leur intérêt marqué pour les thématiques du cluster et leur souhait d’investir dans ces domaines en lien avec la recherche sont aussi reconnus au travers de cette labellisation.

Avec cette reconnaissance viennent des moyens significatifs pour renforcer cet écosystème et lui conférer une véritable dimension internationale. De manière très concrète, et avant même la mise en place des premières mesures financées par France 2030 dans le cadre du projet, la labellisation nous permet d’être au cœur de nouveaux projets comme le futur de confiance.ai au niveau européen, le KIC Water qui se met en place ou encore les projets portés par les agences de programme sur les composants pour l’IA ou l’évaluation de l’IA. La labellisation nous implique aussi dans la coordination nationale des 9 clusters IA, en lien avec les missions d’agence de programme confiées à Inria. On peut dire que l’ensemble de ces éléments place la Bretagne comme acteur de premier plan de la stratégie nationale en IA. Enfin, la labellisation confère aussi à l’ensemble des acteurs impliqués une visibilité internationale sur laquelle nous devons capitaliser pour être pleinement reconnus comme un hub attractif à l’international.

Quels sont les objectifs principaux de ce projet  pour booster la recherche sur l’IA en Bretagne ?

De manière synthétique, les objectifs principaux sont de renforcer le potentiel de recherche académique sur les sujets mis en avant par le cluster, d’accroître de manière significative les formations de pointe au niveau master et doctorat, et de renforcer la collaboration entre recherche académique et innovation au sein des partenaires. Dans tous ces objectifs, la dimension européenne et internationale est primordiale pour renforcer l’attractivité des talents et la présence dans l’écosystème de la recherche européenne.

Pour ce faire, le cluster va progressivement déployer un ensemble d’instruments. En recherche, on peut notamment citer des chaires de recherche académiques et/ou industrielles, un programme doctoral et post-doctoral tourné vers l’Europe, ou encore une présence accrue dans les réseaux européens de la recherche. Sur le plan de la formation, dans la continuité des actions engagées dans le projet CMA TIARe pour le site rennais, le cluster va faire émerger de nouvelles formations, que ce soit en IA ou au croisement entre IA et cybersécurité ou IA et environnement, dont certaines tournées vers le recrutement européen. Une école universitaire de recherche sera créée pour coordonner les formations, favoriser le partage et surtout fournir un point d’entrée unique pour les étudiants et les entreprises désireuses de s’impliquer.

Enfin, sur le volet de l’innovation, le cluster animera l’écosystème pour favoriser le transfert de connaissance et l’innovation, en lien avec BDI, les pôles et les sept technopôles de Bretagne. Au-delà de séminaires, cela se matérialisera par exemple via des thèses industrielles, la participation aux chaires de recherche, la création de laboratoires communs, ou encore la mise en place d’un pôle ingénierie pour faire le pont entre savoir-faire académique et besoin des entreprises au travers de projets d’innovation (typiquement dans la logique des appels portés par la région et pilotés par le pôle) ou du développement de preuves de concept. La participation des entreprises à la formation, par l’apprentissage ou encore le développement de projets étudiants autour de besoins (et potentiellement de données) fournis par les entreprises, ainsi que la formation continue, sont aussi des mécanismes envisagés pour booster la recherche et l’innovation en IA.

Quels sont les rôles des différents partenaires éducatifs, institutionnels et industriels dans ce projet ?

Le rôle des partenaires et des associés est clair et découle tout naturellement des objectifs et instruments décrits précédemment. Le consortium est avant tout académique avec une volonté commune de l’ensemble des acteurs de renforcer la recherche, l’offre de formation, et de développer une marque internationale attractive autour de l’IA et de son croisement aux domaines choisis. Ces derniers reflètent d’ailleurs sans surprise les domaines d’excellence des différents établissements impliqués.

Le rôle des industriels partenaires du projet est avant tout un rôle d’innovation dans leur business et de renforcement des partenariats avec les académiques pour gagner en compétitivité et en attractivité.

Ces deux rôles, celui des académiques et celui des industriels, sont vu au sein du cluster comme en pleine complémentarité. Bien que les industriels ne soient pas membres du consortium, ils seront bien sûr fortement associés au cluster : on parle par exemple ici de représentants industriels au conseil d’administration, de participation aux instances d’évaluation (l’équivalent du CSV du pôle), d’implication dans la formation, de consultations régulières sur les choix et les grandes décisions stratégiques. Les institutions sont là en soutien, et nous espérons que la dynamique mise en place grâce au cluster IA contribuera à leur politique et à leur renforcement.

En particulier, le cluster s’appuie sur un partenariat fort avec la DGA, que ce soit du côté des académiques ou des industriels, en accompagnant la montée en puissance de l’IA et de ses applications à la cybersécurité et à la maîtrise de l’information dans le domaine de la défense, notamment à Bruz avec l’arrivée de l’AMIAD et le renforcement du pôle cybersécurité.

Comment le cluster va aborder les questions de cybersécurité et de défense avec l’IA, de même qu’utiliser l’IA pour répondre aux défis environnementaux et climatiques ?

En promouvant une recherche de pointe et en développant une offre de formation en lien avec ces recherches.

Ensuite, il s’agit d’un choix des thématiques fondamentales à mettre en avant.

Sans être exhaustifs, on peut mentionner que la sécurité de l’IA est un axe fort du projet, tout comme l’est l’utilisation de l’IA pour la sécurisation des systèmes informatiques. L’IA hybride, couplant modèles physiques et apprentissage automatique ou bien connaissances formelles et apprentissage automatique, est aussi un axe fort notamment en lien avec l’observation et la modélisation de l’environnement. On retrouve également des thématiques en lien avec la frugalité, au niveau des accélérateurs matériels pour des systèmes embarqués, de la simplification des modèles, de l’apprentissage à partir de peu de données. L’imagerie satellitaire pour l’observation est un domaine dual qui soulève de nombreuses problématiques scientifiques fondamentales, notamment pour définir de nouveaux modèles à très haute performance. Le traitement du langage et des images, par exemple pour la lutte contre les influences numériques, fait aussi parti des thématiques prioritaires.

Mais la confiance et la sécurité dans et par les systèmes d’IA ne s’arrête pas aux mathématiques et à l’informatique, loin s’en faut. Les questions d’éthique, de régulation et d’audit, d’acceptabilité des technologies et des usages, d’anticipation des mutations sociales et sociétales sont autant de sujets qu’il convient de creuser dans un dialogue constant entre sciences technologiques et sciences humaines et sociales.

Quelle est votre vision à long terme pour SequoIA et son impact sur la recherche et l’industrie de l’IA en France ?

La vision que nous poursuivons est celle d’un cluster Sécurité, Confiance, IA reconnu comme une référence mondiale en recherche et en formation dans les trois piliers du projet, adossé à un écosystème industriel leader et à fort impact. Et tous les ingrédients sont là pour y arriver ensemble !