Publié le 12/07/2018
Tous les intervenants le diront : il existe un réel déficit de participation française aux appels à projets européens. Un constat qui vaut en particulier pour les startups et PME… Alors, comment rectifier le tir ? Un matching camp “Objectif Europe” faisait le point sur les opportunités européennes. Il se tenait à Rennes, en amont de l’Open Innovation Camp du 3 juillet.
Quelques intervenants ciblés, un nombre limité de participants, du temps réservé aux échanges… Le matching camp est un moyen efficace de traiter un sujet tout en nouant des contacts pour aller plus loin. Celui intitulé “Objectif Europe” était destiné à faire le point sur les opportunités de projets d’innovation et de business en Europe et sur les moyens pour y participer. Il était organisé avec trois autres ateliers par Images & Réseaux en matinée de l’OIC2018 dans le campus rennais de Technicolor.
Que faut-il en retenir ? D’abord cette injonction : il faut améliorer la participation française aux appels à projets européens. C’était notamment le sens de l’intervention de Frédéric Laurent, Point de contact national (PCN) du programme Horizon 2020 pour les TIC. Quand la France verse 1 euro pour le financement des AAP européens, elle en récupère 69 centimes. “Globalement, on pourrait faire beaucoup mieux.” Principale raison du déficit, le manque de dépôt de projets : “Pour gagner il faut jouer, et nous ne jouons pas assez.” Car par ailleurs le taux de succès des participants français est plutôt élevé : 17 % en moyenne pour les TIC.
Quelques autres messages du PCN. “C’est ouvert à tous”, pour signifier que les projets européens ne sont pas réservés aux gros acteurs. “Si vous avez un problème de trésorerie, Horizon 2020 n’est pas fait pour vous”, car les délais de financement sont très longs. “Les meilleurs experts sur votre sujet, c’est vous et vos partenaires. Soyez pédagogiques… Soignez votre proposition !” Ce dernier conseil attire l’attention sur la qualité du dossier à déposer. En particulier sur l’articulation du projet entre les différents partenaires qui n’est en rien du temps perdu car : “Meilleure est la proposition, mieux le projet fonctionnera.”
Frédéric Laurent
Frédéric Laurent focalisait ensuite son discours sur un dispositif H2020 très particulier : Instrument PME. Il est en réalité une sorte de capital risque “sauf qu’il s’agit de subvention”. Et avec cette particularité qu’un projet Instrument PME peut n’être porté que par une seule entreprise. L’outil est destiné aux PME à fort potentiel de croissance. Celles “qui vont exploser leur chiffre d’affaires” grâce à ce soutien. À utiliser donc lorsque l’on se trouve “au début de l’exponentielle”. Par exemple en parallèle à une levée de fonds car, “il faut que le projet commercial soit solide.”
Toujours pour les PME, les pôles de compétitivité de Bretagne et Pays de la Loire ont mis en place un dispositif d’accompagnement toutes thématiques dénommé Croissance Europe. Développé en association avec quatre technopoles, il était présenté par Maud Tronchin d’Atlanpole et Pauline Presse de Technopôle Brest-Iroise. Leurs rôles : “Accompagner l’entreprise sur toute la phase de montage du projet… Et éventuellement au-delà, sur l’aspect gestion.” En particulier, elles sont à même de juger si les entreprises, qu’elles connaissent bien par ailleurs, sont “mûres pour aller à l’Europe”. Parmi les critères incontournables : “L’Europe doit s’inscrire dans la stratégie de l’entreprise.”
L’intervention à suivre de Vincent Roirand illustre ce dernier propos par un témoignage. Il dirige Mazédia, une PME spécialisée dans la conception de programmes multimédia pour la culture et la muséographie ayant une expérience des projets européens. L’entrepreneur met également l’accent sur la dimension stratégique. Ainsi : “Le projet doit s’inscrire dans la stratégie R&D de l’entreprise… On recherche les calls qui répondent à ses besoins plutôt que l’inverse.” Et encore : “Il ne faut rechercher des collaborations internationales que si l’entreprise a une ambition internationale.”
Intervenait également lors de ce matching camp, François Morin qui présentait EIT Digital. Cette structure européenne lance des appels à projets destinés aux PME qui visent de changer d’échelle, les scaleups (équipe > 10 personnes, CA > 1 M€). Selon le European Business Developper, le trio gagnant pour avoir une chance d’être retenu est le suivant : “Techno Provider, Business Champion, End User”. Ce qui fut illustré par un projet EIT Digital commenté par Gaël Maugis et dénommé CEDUS : City Enabler for Digital Urban Services.
Dernier intervenant, Jean-Dominique Meunier (Technicolor) présentait NEM, la plateforme technologique européenne dédié aux contenus dont il est le président exécutif. NEM est un outil de réseautage (plus de 1000 membres) et d’influence qui sert à “se mettre en ordre de bataille pour Horizon Europe”. Celui-ci est futur programme européen, successeur de H2020. L’intervenant, également VP Images & Réseaux, souligne que l’Europe est “un point prépondérant” de la phase IV des pôles de compétitivité. Mais il pointe la difficulté à mobiliser les startups françaises “plus intéressées par lever des fonds qu’à aller chercher des financements européens”.
Peut-être faut-il élargir le cadre ? Et voir les projets européens comme étant de précieux outils de contact à l’international ? C’est l’avis de plusieurs participants lors des échanges qui ont conclu l’atelier. “Je connais des entreprises qui ont monté un projet qui n’a pas abouti mais qui ont créé du réseau.” Et aussi : “Il faut parler business avant de parler R&D pour intéresser les gens.” Un Club International Images & Réseaux est prévu à la rentrée sur le sujet.
Photo de Une : Caroline Ablain