Vers la co-construction d’un “internet de l’énergie”

Publié le 21/09/2016

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19 septembre 2016, pour cette nouvelle édition de la Nantes Digital Week, Enedis, Images & Réseaux et le cluster Think Smartgrids proposaient ensemble un petit-déjeuner autour des données de l’énergie et comment créer de nouveaux services. Autour de la table, Gérard Le Bihan directeur Images & Réseaux et Président du cluster SmartGrids France, Gérard Auriol, Directeur Délégué Ouest d’Enedis, Yann Person CEO de la startup EP et Didier Lafaille, Chef du département technique de la commission de Régulation de l’Energie. Le tout animé par Olivier Barraud de Phares et Balises. Extraits choisis

Le métier des énergéticiens en pleine transformation

Le premier constat est sans appel, le métier d’Enedis change et se transforme en profondeur pour devenir un « internet de l’énergie » devant permettre aux producteurs d’échanger de l’électricité dans les 2 sens. A cela s’ajoute le numérique comme le montre le projet Linky qui représente un investissement de 5 Milliards d’euros d’ici à 2021. Mais le plus important, le nerf de la guerre autour de ces données reste les services, les outils qui sont autour des données. C’est notamment pour cela qu’existe les démonstrateurs sur l’ensemble du territoire national dont 2 dans l’Ouest pour tester à l’échelle d’un département, d’une région, d’un territoire et des citoyens des outils. Et comme le confie Gérard Auriol, aujourd’hui nous rentrons dans l’étape crucial où on passe de l’expérimentation à l’industrialisation en respectant les réglementations qui s’imposent en terme de CNIL, de données personnelles mais aussi de sécurité, … Car qu’on se le dise on ne peut pas ouvrir les données du citoyen comme cela. Des projets comme le Datalab de Nantes et la création d’une plateforme sont faits pour expérimenter.

La donnée oui mais avec des services associés

Yann Person, CEO d’EP, le confirme « la data s’est bien mais il faut se poser la question de à quoi ça sert. Car le citoyen, visualiser sa courbe de charge cela ne l’intéresse pas ! ». C’est là tout le pouvoir du service proposé par la startup : associer les données de l’habitat, le profil du bâtiment aux habitudes de vie pour pouvoir donner des conseils en termes d’actions, de rénovations, … et in fine d’impact sur la facture énergétique du citoyen.

L’enjeu aujourd’hui c’est de croiser les informations de consommation, les informations de productions, les informations industrielles sans pour autant se faire une montagne. Car si les données sont accessibles « nous ne sommes pas encore au stade de Big Brother » confie Gérard Auriol. Nos téléphones sont pires et on ne se pose pas la question. L’énergie est un marché très réglementé, et aujourd’hui on ne peut pas utiliser les données des gens sans leur consentement. Mais d’ailleurs à qui appartient la donnée ? C’est le grand débat philosophique qu’amorce Yann Person. En fonction de si on considère que la donnée appartient au client ou à l’entreprise qui collecte ce n’est pas la même chose en termes d’éthique notamment. Chez EP on considère que la donnée appartient au client et que cette donnée doit lui être remise pour lui permettre de prendre les meilleures décisions. Mais là encore nous sommes dans un débat d’initiés explique le dirigeant car au final le consommateur s’en moque à partir du moment où on lui délivre un service.

De l’importance d’une co-construction et du travailler ensemble entre énergéticiens et startups

Et c’est là que l’articulation entre des entreprises comme Enedis et des startups/PME comme EP rentre en compte. Car Enedis n’a pas le droit d’apporter des services additionnels, ces derniers sont co-construits grâce à un maillage important entre les 2 mondes pour mettre en place des dispositifs gagnants. Le citoyen veut savoir comment optimiser sa vie dans l’habitat avec un avant – après. « Car client libre et informé a plus de valeur qu’un client captif et désinformé ».

Côté collectivité comment ça se passe ? Les intervenants s’accordent sur la complémentarité entre l’espace rural et l’espace urbain. Avec l’idée qu’on produit à un endroit et on consomme à un autre. Un outil indispensable pour les collectivités apparaît donc comme étant des plateformes faciles d’accès pour permettre les échanges. L’importance reste avant tout dans le retour d’expériences et sur le territoire on commence à en avoir assez pour devenir légitime et exemplaires. Le travailler ensemble entre les collectivités, les acteurs comme Enedis et les startups semble indispensable. Et pour la technique le mot interopérabilité ressort un certain nombre de fois dans le débat. Il faut à la fois lutter contre la prolifération des outils mais en même temps éviter l’usine à gaz qui veut tout contrôler car l’énergie est une filière où le facteur temps est important. Comptez 7 ans pour lancer un chantier éolienne ! Conséquence première il faut prévoir à long terme sans tenir compte de toutes les fluctuations du marché. Et les données permettent justement, associées à l’expérimentation, de calibrer les investissements.

 

On le comprend les lignes doivent encore bouger et il y a de nombreuses initiatives décentralisées. Enedis s’avère être un acteur très attentif aux territoires, aux écosystèmes avec notamment son concours jeunes pousses qui va être renouvelé. Mais c’est en tant que béotien qu’on ne peut que se dire qu’en France ce n’est pas tout de suite que l’on verra apparaître une place de marché de l’énergie comme on le voit à Brooklyn par exemple. L’autoproduction et l’autoconsommation ne sont pas encore ancrées dans les habitudes et le modèle réglementaire et économique de la filière en France n’est pas prêt.