Publié le 14/01/2019
L’absorption des ondes électromagnétiques est un domaine de recherche aux enjeux multiples : pour arrêter les ondes et préserver la santé, éviter les interférences à l’intérieur des systèmes, éliminer les émissions parasites des antennes… Aussi, pour fabriquer des engins furtifs dans le domaine militaire. En réponse, le projet 3DRAM explorait de nouvelles technologies de réalisation de matériaux absorbants aux qualités inégalées : performants dans les bandes de fréquences inférieures à 4GHz, ultra-minces, souples et légers.
Téléphone mobile, Wi-FI, Bluetooth, appareils télécommandés… Sans qu’il y paraisse nous baignons dans un jus d’ondes aux fréquences multiples. De plus en plus épais à mesure que se développe les applications sans fil. Si bien que l’absorption des ondes électromagnétiques devient un champ de recherche d’importance, bien au-delà des applications de défense où il fût longtemps cantonné. “Un jour les normes contraindront à isoler les bâtiments des ondes électromagnétiques, à commencer par les écoles et les hôpitaux” prévient Vincent Laur pour illustrer. Chercheur au LabSTICC, il a coordonné pendant 3 ans le projet collaboratif 3DRAM qui réunissait aussi deux autres laboratoires universitaires : IRDL également à Brest et IEMN à Lille.
3DRAM menait des recherches dans deux directions complémentaires, la première étant l’amélioration des propriétés d’absorption. Sur ce sujet, l’idée était de cumuler deux techniques. D’abord en élaborant un matériau composite “naturellement absorbant” grâce aux particules magnétiques qui entrent dans sa composition. Puis en utilisant ce composite pour créer un métamatériau, donc une matière artificielle dont la structure lui confère des propriétés supplémentaires. “Les métamatériaux ont des structures à base de motifs périodiques, ce qui leur donne des propriétés extraordinaires dans le sens où on ne peut pas les atteindre avec des matériaux naturels. Nous avons démontré que certaines structures permettent d’augmenter de façon significative la bande passante d’absorption électromagnétique.”
La deuxième direction de recherche consistait à développer de nouvelles techniques de fabrication additive d’absorbants qui permettent notamment d’épouser des formes complexes. “Nous avons prouvé qu’on pouvait mettre en forme un matériau absorbant par impression 3D et réaliser ainsi un composant peu cher, très léger et dont les performances d’absorption sont excellentes.” Ce procédé pourra par exemple être utilisé pour fabriquer des pièces particulières là où le raccordement entre deux surfaces absorbantes est difficile à réaliser. 3DRAM a également montré la faisabilité de matériaux en nids d’abeille complexes, remarquables par leurs propriétés d’absorption.
Les recherches menées par l’équipe 3DRAM étaient exploratoires. Elles visaient à combler des lacunes – les absorbants existants sont rigides, épais, lourds et difficiles à mettre en œuvre – alors que les applications des absorbants électromagnétiques tendent à se multiplier. Par exemple, une nouveauté : on construit aujourd’hui des éoliennes furtives pour éviter qu’elles ne perturbent les signaux radar à proximité des aéroports.
Les résultats concluants du projet terminé en février 2018 donnent aujourd’hui matière à de nouvelles ambitions, cette fois davantage applicatives et sur plusieurs sujets : industrialiser la fabrication d’absorbants ultra-minces, utiliser les techniques de fabrication additive pour réaliser des charges hyperfréquences compactes dans le domaine spatial, développer des absorbants intégrés dans des systèmes antennaires en bande millimétrique… Ceci pour ne citer que quelques-unes des voies ouvertes par 3DRAM, dont il est acquis qu’elles se prolongeront par des projets industriels.
Illustration @3DRAM : Nids d’abeille simples et structurés réalisés par impression 3D filaire
3DRAM est un projet labellisé Images & Réseaux soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR). Voir la fiche ANR