Publié le 06/01/2023
Au programme de cette matinée organisée par les pôles Images & Réseaux et TES, des interventions d’experts, une table ronde et un showroom de stands ont permis de jeter un regard d’ensemble sur cette technologie qu’est l’IA, touchant tour à tour aux questions d’explicabilité, d’acceptabilité et d’accessibilité, d’embarqué et de frugalité, mais également de connexions au réel. Des questions majeures à l’heure où l’IA touche de plus en plus d’aspects de notre quotidien !
Une journée riche d’enseignements avec le soutien de l’ESEO d’Angers et de DIVA, European Digital Innovation Hub (EDIH) des Pays de la Loire.
Si le terme IA ne cesse de se rappeler à nous depuis quelques années, ce concept est apparu en premier lieu après la 2GM comme nous le rappelle Elisa FROMONT, le terme en lui-même n’arrivant qu’en 1956. Les définitions n’ont cessé de se multiplier depuis, Elisa Fromont nous présente cette dernière ; « L’intelligence artificielle est une science qui explore la construction et l’étude d’algorithmes qui permettent à des machines de faire des tâches aujourd’hui plutôt réservées à l’homme ou l’animal » bien que le concept mouvant, ne permette pas de s’arrêter à une seule et unique définition.
Parmi ce vaste sujet que représente l’IA, Elisa FROMONT évoque notamment l’apprentissage automatique, un sous domaine de l’IA qui explore la construction et l’étude d’algorithmes qui peuvent apprendre et acquérir de la connaissance à partir d’exemples et d’expériences, comme l’analyse d’images de drones, des données économiques (la Bourse), etc.
Si les apprentissages sont infinis, des challenges restent encore à relever. En premier lieu, celui de la frugalité. La sobriété énergétique doit en effet entrer en ligne de compte, que ce soit pour la frugalité du modèle avec notamment la compression de ce dernier avec l’élagage des paramètres, ou la frugalité des données qui reste le plus consommateur d’énergie. Ce n’est pas le seul challenge, des questions d’adaptabilité se posent également ; savoir détecter des changements par exemple. Enfin, les challenges d’explicabilité et d’équité sont également présents. Les challenges actuels sont ainsi encore nombreux dans cette science qui ne se résume ainsi pas à l’apprentissage automatique.
Pierre GIRARDEAU de Cross Data revient à son tour sur l’explicabilité des algorithmes. Il ne faut pas selon lui croire une IA sur parole ; « Quand vous croisez un humain dans la rue, il vous faut un peu de temps pour lui faire confiance ; pour la machine, c’est la même chose ». Jusqu’à récemment, plus les algorithmes de machine learning étaient performants, moins ils étaient explicables ! Or, si vous souhaitez que vos équipes fassent confiance aux prédictions des algorithmes, mieux vaut être capable de leur expliquer comment celui-ci arrive à sa conclusion. De récents travaux de recherche permettent maintenant de mettre en avant la contribution de chacun des facteurs à la prédiction d’algorithmes même complexes, permettant une meilleure explicabilité et acceptation de ces derniers. Il est ainsi important d’expliquer les résultats d’IA, Pierre GIRARDEAU nous l’a illustré à travers une application à la conquête commerciale pour le secteur de la pièce détachée agricole.
L’Intelligence Artificielle se développe dans tous les secteurs. Le groupe Thalès n’y fait pas exception. Olivier GRISVARD nous a présenté à cette occasion l’approche du groupe en matière de développement et d’intégration des techniques et solutions fondées sur l’intelligence artificielle dans les systèmes aéronautiques, de défense et de sécurité, principale activité du groupe Thales. Avec le lancement d’initiatives pour l’émergence d’idées en IA comme Starbust ou Station F, et plus de 200 experts en France et au Canada, 2 axes stratégiques sont posés pour Thalès ; la problématique d’IA de confiance / Certification.
Développer des systèmes IA de confiance est primordial mais complexe. Mathias BOLLAERT, actuellement chercheur en détachement à l’IMT Atlantique Brest, nous explique que les solutions proposées dans le domaine de l’IA explicable sont souvent réservées à des experts. Pour améliorer l’acceptabilité et l’efficacité de ces solutions, il est important de développer une confiance appropriée entre l’utilisateur final et l’IA. Pour cela, différentes approches sont envisagées : interpréter le comportement de l’utilisateur et s’y adapter, améliorer la collaboration humain / IA, ou encore humaniser le fonctionnement de l’IA (avoir un découpage du raisonnement pour mieux comprendre comment l’IA effectue ses calculs.) Tout ceci permet de développer des IHM plus acceptables, adaptive avec une confiance renforcée.
En matière d’IA se pose également la question de l’acceptabilité et accessibilité de celle-ci. Alexandre AGOSSAH, Ergonome IHM / Doctorant (SIGMA, Nantes Université, Ecole de Design Nantes Atlantique) interroge sur la place de l’humain dans l’IA, sur ce qui est acceptable individuellement et collectivement. L’acceptabilité implique la prise en compte des facteurs humaines dans l’utilisabilité d’outils informatiques. De nombreuses préoccupations existent en effet sur ce sujet avec les représentations de soumission à l’IA voire remplacement par l’IA. Pour favoriser l’acceptabilité de l’IA, Alexandre AGOSSAH nous présente leur approche, à savoir la mise en place d’une méthodologie permettant d’identifier les freins et leviers à l’usage des outils intégrant de l’IA en contexte professionnel avec un intérêt notamment pour les méthodes permettant de mesurer et mobiliser la confiance du réseau de parties prenantes (indices de concordance Kappa qui permet de mesure l’accord entre deux personnes).
Les notions d’efficacité et de frugalité sont également soulevées. Eric FONTES, responsable produit, réalise ici un retour d’expérience sur le projet ORTIKAT, sélectionné dans le cadre de l’AAP PSPC Régions (financé par la Région PDL et Bpifrance) et co-labellisé par Images & Réseaux et Vegepolys Valley. Il s’agit d’un projet de conception d’un écosystème technologique ouvert et innovant pour des applications d’intelligence artificielle embarquée en local pour le déploiement d’outils d’aide à la décision « à la carte » en agriculture au plus près de la donnée (edge computing) ; prévisionnel d’interventions, optimisation des coûts, logistique, énergétique etc. Il existe beaucoup de cas particuliers à gérer, de nombreuses collectes étant simultanées, générant beaucoup de données. Un des verrous de ce projet apparaît dans la frugalité liée à l’edge computing ; les ressources doivent donc être optimisées : au niveau de l’architecture, des traitements utiles, des coûts de revient.
La frugalité quand on parle d’IA, n’est pas toujours évident comme nous l’explique Mathieu LEONARDON, IMT Atlantique. Les réseaux de neurones sont devenus les algorithmes à l’état de l’art dans de nombreux domaines incluant la vision par ordinateur, l’audio, le traitement du langage. Cela se fait au prix d’une empreinte mémoire considérable et d’une très forte puissance calculatoire. C’est la raison pour laquelle la compression de neurones est utile : l’élagage (enlever des parties de la convolution), la quantification, la factorisation (utilisée dans le domaine du mobile net par exemple), la recherche d’architecture neuronale (NAS) pour les systèmes embarqués. Il serait cependant plus pertinent d’utiliser dès le départ des réseaux dimensionnés de manière adéquate.
L’IA concerne de nombreux domaines d’usage ; l’agriculture où il est pertinent de déployer des solutions d’IA à l’image du projet ORTIKAT évoqué en amont, la santé avec de nouvelles méthodes de diagnostic, mais aussi la défense comme le présente Loïc CUDENNEC, chargé d’expertise en IA, DGA. En effet, l’innovation de défense est un sujet prioritaire pour la conservation de la supériorité opérationnelle et de l’autonomie stratégique des Armées. Les récentes avancées en Intelligence Artificielle ont permis d’imaginer de nouvelles applications numériques souvent en rupture avec l’existant. La captation de ces innovations principalement issues du monde civil constitue aujourd’hui un enjeu majeur pour la modernisation et la transformation des Forces. Pour cela, de nombreux dispositifs existent via le portail AID.
L’IA devient importante pour les entreprises. Simon BOISSERPE, coordinateur du EDIH DIVA, nous présente ce nouveau dispositif. Initié en 2020, DIVA a pour mission de démocratiser et sensibiliser les entreprises des Pays de la Loire aux usages et enjeux des données et de l’Intelligence Artificielle. Un programme concret d’accompagnement permettra aux entreprises régionales d’identifier leur problématique et de saisir les nombreuses opportunités offertes par l’Intelligence Artificielle.
Pour François KHOURBIGA, Defants, si l’IA est encore peu utilisée, un travail de préparation des données est à faire. En effet, l’explicabilité est primordiale, et sera « essentielle pour que les futurs experts en cybersécurité puissent comprendre, faire raisonnablement confiance et gérer efficacement une nouvelle génération de systèmes artificiellement intelligents ». Selon lui, dans un futur proche, l’IA pourrait ainsi être complémentaire, assistant les analystes pour avoir une vraie autonomie d’investigation et de décision.
Merci au soutien de l’ESEO et DIVA qui ont permis la tenue de cette belle rencontre riche d’enseignements !
La prochaine Technoférence se tiendra le 2 mars sur le thème du métavers à Rennes, sur le site d’Interdigital. Intéressé ? Vous pouvez vous inscrire dès maintenant !