Publié le 07/05/2019
C’est une petite société installée à Angers, mais grande est son ambition. ESP (European Sustainable Propulsion) développe une nouvelle génération de drones lourds dont la propulsion est distribuée sur un ensemble coordonné de turbines électriques. D’une fiabilité sans équivalent, ces turbo-drones ouvrent de nouvelles perspectives d’usage dans l’industrie, la sécurité civile, la défense…
Le principe fondamental qui guide les travaux d’ESP est la propulsion distribuée électrique : l’aéronef est propulsé par un ensemble de turbines électriques distribuées et orientées en 3D qui garantissent la fiabilité du vol. Cette motorisation très réactive et contrôlée par calculateur permet de décoller et atterrir verticalement, d’assurer la stabilité même dans des conditions difficiles, et de se diriger avec précision vers un point de destination.
Le concept avait été posé dès 2009 en Angleterre par un professeur de l’Université de Brighton, David Brotherton-Ratcliffe. Puis repris à partir de 2013 par le consortium Neva Aerospace créé spécifiquement pour développer l’idée. ESP en est le prolongement industriel. Installée sur l’aéroport d’Angers depuis 2018, la société conçoit, fabrique et commercialise les turbines électriques. En parallèle, elle assemble les premiers prototypes de turbo-drones et expérimente la propulsion distribuée électrique en conditions réelles.
Robert Vergnes, président d’ESP, dirige avec passion cette aventure industrielle. En développeur de projet expérimenté, il sait qu’il faudra procéder par paliers : “Nous nous concentrons dans un premier temps sur le transport de fret. L’utilisation de turbines permet de réaliser des drones relativement compacts. Plus vous ajoutez de turbines, plus vous levez de charge.”
Aujourd’hui les turbo-drones d’ESP pèsent moins de 25 kg au décollage, dont 5 kg de charge utile. D’ici la fin de l’année 2019, ces chiffres devraient doubler environ. Et au-delà ? “Nous développerons des drones jusqu’à 2 tonnes de poids total, capables d’emmener des charges de 300 à 500 kilos sur des distances de quelques dizaines de kilomètres. Principalement pour effectuer du transport inter sites en local.”
Le turbo-drone multiplie les avantages : il est plus précis et beaucoup plus sûr que les drones à hélice ; il est beaucoup moins coûteux qu’un hélicoptère en termes d’achat et, plus encore, de maintenance ; son impact environnemental est limité… À terme, on peut imaginer de multiples applications : participer à la maintenance d’un ouvrage ou assister des forces de sécurité civile par exemple. Le secteur de la défense se montre aussi fortement intéressé : “Nous avons participé au salon SOFINS 2019, ça s’est très bien passé.”
L’entreprise, qui compte 5 collaborateurs, dispose d’un local de 350 mètres carrés. Elle fabrique “une dizaine de turbines par mois” pour l’instant commercialisées essentiellement outre-Atlantique : au Canada et aux Etats-Unis. Sur le plan R&D, elle est engagée dans un projet européen, Apollo, sur le thème Nouvelles technologies et écologisation des transports.
À côté de développement de turbines plus puissantes, ESP s’intéresse de près aux technologies qui permettent “d’ajouter de l’intelligence dans le cadre du vol autonome”. Il s’agit de Deep Learning, de reconnaissance optique, de reconnaissance d’objets, de connectivité en vol… Selon Robert Vergnes : “Nous n’en sommes qu’aux balbutiements car il faut aussi s’interconnecter avec le monde de l’aéronautique tel qu’il est aujourd’hui. Ce qui ajoute un supplément de complexité pour aboutir à la prise de décision autonome.”