Publié le 16/11/2020
Interrogé sur l’Internet des objets appliqué au monde de l’industrie (IIoT), Nicolas Guilbaud, CTO de eSoftThings, perçoit dans l’intelligence artificielle “On the Edge” une voie prometteuse. La centralisation dans le cloud n’est plus la règle. Lorsque c’est opportun, les algorithmes AI s’exécutent au plus près de la production des données.
Nicolas Guilbaud. eSoftThings est une société créée il y a 6 ans autour de deux activités principales. L’Internet des objets Full-stack, qui va de la conception des objets et capteurs jusqu’à la plateforme IoT et aux applications. Et puis, dans le domaine de l’automobile, les systèmes ADAS de conduite assistée et conduite autonome avec de fortes compétences en intelligence artificielle. Nous sommes installés à Cesson-Sévigné où travaillent une cinquantaine de personnes.
Avec l’acquisition de notre société, LACROIX Group renforce son positionnement autour de l’IoT industriel et de l’intelligence artificielle. Quant à eSoftThings, nous poursuivons nos opérations et continuons à servir nos clients comme auparavant tout en ayant gagné, dans notre positionnement, la force d’une ETI et sa capacité de production d’objets en tant qu’industriel expert des équipements électroniques connectés.
Nicolas Guilbaud. Parmi les affaires que nous avons à traiter, je vois trois principaux cas d’usage de l’IoT industriel. C’est d’abord la maintenance prédictive avec pour objectif d’anticiper les pannes de production. On va par exemple déployer des capteurs de vibration ou de température qui permettront de détecter les anomalies et d’optimiser les cycles de maintenance. Le deuxième point est la maitrise des processus industriels. Il s’agit cette fois d’obtenir des métriques qui permettront d’améliorer la compétitivité de l’outil de production. Par exemple en économisant de la matière, en optimisant les temps d’utilisation des machines, en améliorant les flux logistiques… Le troisième cas d’usage est complémentaire : de plus en plus d’entreprises veulent réduire leur empreinte carbone. On cherche alors à réduire la consommation d’énergie, notamment la facture d’électricité.
Nicolas Guilbaud. Ce que permet l’IIoT, c’est la fusion entre l’OT et l’IT. Le premier, l’OT, est le monde du contrôle-commande industriel qui s’appuie sur des bus éprouvés mais ne peut pas s’interfacer directement avec un système d’information. Le deuxième est le SI de l’entreprise, qui fonctionne le plus souvent avec un gestionnaire de type ERP. Grâce à une infrastructure IoT, toutes les machines peuvent communiquer avec des services IT et des technologies Web faciles d’utilisation. L’idée, c’est de faire en sorte que toutes les machines d’une ligne de production, même si elles ne sont pas récentes, soient faciles d’accès pour les gens qui développent des services à valeur ajoutée.
Nicolas Guilbaud. Il n’y a pas de règle absolue, ça dépend du cas d’utilisation. L’avantage du Cloud, c’est la centralisation des données par exemple pour des traitements d’intelligence artificielle. Alors que l’architecture Edge évite de transmettre des données brutes au fil de l’eau, ce qui permet d’économiser de l’énergie et de la bande passante.
Ceci étant dit, il existe beaucoup d’autres paramètres qui vont faire pencher la balance d’un côté ou l’autre. Ça peut être la peur d’une attaque extérieure, qui fait que l’on préfère fermer les portes de l’usine par une solution On-premise. Il arrive aussi qu’on ne dispose pas d’une connexion suffisante et fiable, ce qui amène à traiter les données sur place. Et puis il y a la question du modèle économique. Qui dit Cloud dit abonnement à un service, ce qui impose d’intégrer le coût du service dans le prix des produits. Souvent les industriels préfèrent une solution On-premise parce qu’elle facilite la maîtrise des coûts des produits sur le long terme.
À eSoftThings, nous sommes IoT Full-stack. Nous maîtrisons toute la chaîne, de l’embarqué au Cloud, ce qui facilite le choix de l’architecture finale. Au cours de l’engineering d’une solution, il arrive fréquemment que l’on utilise une solution Cloud pour mettre au point les algorithmes de traitement. Puis de descendre ces algorithmes vers l’Edge, dans un serveur de l’usine ou même directement dans les capteurs.
Nicolas Guilbaud. Les solutions IoT existent, les différents métiers de l’industrie savent quels avantages ils peuvent en tirer, nous entrons maintenant dans l’ère de la massification. Il reste deux gros sujets qui mobilisent chez nous beaucoup d’efforts de R&D. Le premier, c’est l’Edge AI, qui consiste à déporter l’intelligence artificielle au sein même de l’usine, et jusque dans les capteurs. Par exemple pour faire de l’analyse de signature énergétique dans le but d’optimiser les consommations. Le deuxième, c’est la Computer vision on the Edge (vision artificielle), pour lequel nous sommes tirés de l’avant par nos développements pour le secteur automobile. Nous appliquons les technologies comme le traitement d’images, la détection de personnes, la reconnaissance d’objets, à d’autres sujets tels que la Smart City tout en faisant en sorte que les algorithmes fonctionnent sur de petites cibles embarquées.
Et puis il y a bien-sûr la sécurité, avec l’ajout de nouvelles fonctionnalités de protection même sur les petits microcontrôleurs. La sécurité est un sujet qui ne s’arrête jamais : il faut toujours avoir une longueur d’avance sur les attaques potentielles tout en conservant un coût produit raisonnable.