Publié le 08/07/2019
C’était à Nantes le 4 juillet. La journée de l’innovation numérique collaborative rassemblait la communauté Images & Réseaux autour de ses projets R&D et d’un défi collectif : accompagner par le numérique les transitions écologique, sociétale et économique. Vainqueur de la R&D Battle, le projet SPATIAL MODULATION est parfaitement en ligne avec le sujet du jour. Il permet d’envisager des objets connectés fonctionnant quasiment sans énergie.
À la pointe de l’île de Nantes, l’ancien Hangar à bananes reconverti en espace événementiel Titan accueillait ce 4 juillet l’Open Innovation Camp Images & Réseaux. L’OIC est l’événement annuel du pôle de compétitivité autour de ses projets collaboratifs. Au programme, un show-room où découvrir les projets et entreprises innovantes, des solutions de financement de R&D, des tables rondes autour du thème des transitions, des ateliers pour faire émerger des idées à développer, et une R&D Battle qui désigne le meilleur projet labellisé.
L’actualité le montre chaque jour, “notre monde est devenu volatile, incertain, complexe et ambigu” avance en introduction Vincent Marcatté. Au point que les transitions énergétique, écologique, sociétale s’imposent comme une urgence, et le numérique comme un outil incontournable. Si bien que pour le président d’Images & Réseaux : “En tant qu’acteurs du numérique, on se sent fortement responsables.”
Le numérique au service des multiples transitions en cours est le grand chantier à venir pour le pôle de compétitivité numérique de l’ouest en construction : I&R + TES. On connaitra le nom de ce grand pôle à la rentrée et “la fusion sera opérationnelle le 9 décembre prochain” annonce le président de TES, Jacques Belin. Francky Trichet de Nantes Métropole insiste pour sa part sur la nécessité de donner du sens à la technologie : “Le numérique est un moyen, un accélérateur… Il faut mettre le citoyen en amont.”
Voilà des mots que Corinne Erhel aurait appréciés. L’élue des Côtes d’Armor, décédée brutalement en mai 2017, était devenue spécialiste de la technologie et du numérique à l’Assemblée nationale. Elle donnera son nom à un prix récompensant des femmes et hommes, entrepreneurs ou doctorants, à l’origine d’innovations numériques au service de la transition écologique ou sociale des territoires. Ce prix, d’envergure nationale, recherche encore quelques sponsors. Il sera bientôt lancé officiellement.
Au centre le député Éric Bothorel. Il est entouré de Vincent Marcatté et Gérard le Bihan, respectivement président et directeur d’Images & Réseaux.
L’OIC est avant tout la fête des projets R&D, avec pour commencer un point sur les possibilités de financement. De la présentation de Sarah Guy, retenons deux informations. D’abord une nouveauté : l’appel à projets PME s’étend désormais aux trois régions Bretagne, Normandie et Pays de la Loire. L’AAP PME 2019 est lancé ce jour même, la date buttoir de réception des dossiers d’intention étant fixée au 5 novembre. Ensuite un changement : les appels à projets FUI sont remplacés par les PSPC-régions. Un appel est en cours depuis juin, avec pour date limite de dépôt des dossiers le 28 août. Darin Beach, pour sa part, faisait un point sur les “nombreux” dispositifs de financement européens. Sur tous ces sujets, plusieurs “événements pour se préparer” sont prévus. En particulier, un Infoday se tiendra le 10 juillet à Rennes et sera largement relayé en visio sur les 3 régions.
L’OIC est aussi l’occasion de décerner le Trophée Loading the Future au meilleur projet collaboratif du moment. Cette année, cinq projets emblématiques étaient présélectionnés : ALAMO et sa Farm Box multi-technos pour raccorder l’ensemble des objets connectés d’une ferme, DEEPBLUE qui a mis au point un laser bleu permettant de détecter des nanoparticules de plastique au fil de l’eau, LOGISTYS dont la solution de cloud coopératif coordonne les transports exceptionnels, PLAYAK qui grâce à la géolocalisation ouvre un nouveau mode de livraison, et SPATIAL MODULATION dont les résultats outrepassent l’objectif initial de connexion des objets 5G en haut débit.
La victoire est allée à un projet collaboratif dont le retentissement est mondial : SPATIAL MODULATION remporte haut la main le trophée Loading the Future 2019. Son principe de base pour connecter les objets 5G en haut débit : faire plus côté réseau grâce au Massive MIMO et à un traitement du signal renforcé ; faire moins du côté objet 5G, donc moins d’antennes dans le terminal, moins de chaînes de radiofréquence (RF), moins de traitement. Et par conséquent consommer beaucoup moins d’énergie. Pour y parvenir, l’astuce consiste à utiliser une antenne compacte reconfigurable qui permet de basculer entre plusieurs diagrammes de rayonnement (modulation spatiale). Au final, le rendement énergétique de l’amplificateur est maximal tandis que le débit est double.
Plus fort, le projet ouvre une perspective révolutionnaire de tags capables de communiquer sans énergie. On pousse le principe plus loin en supprimant la chaîne RF de l’objet. Celui-ci n’émet plus, il utilise les ondes ambiantes qu’il rétrodiffuse comme un miroir et déforme grâce à la modulation spatiale. Si l’objet est en plus capable d’utiliser l’énergie ambiante pour fonctionner, on aboutit à un tag sans batterie capable de recycler les ondes existantes pour communiquer. Impressionnant !
L’ensemble de ces travaux aboutit à une trentaine de publications, 5 dépôts de brevets, 3 démonstrations dans des conférences internationales… Un écho international qui a valu à Dinh Thuy Phan Huy, ingénieure à Orange Labs et coordinatrice du projet, d’être récompensée du Grand Prix Ferrié 2018. Autour d’Orange Labs, SPATIAL MODULATION réunit Centrale Supélec, l’Institut Langevin-CNRS, l’Insa Rennes-IETR, l’IMT Atlantique-LabSTICC et TRCOM-Groupe ATOS.
L’objectif de la journée était aussi de se tourner vers l’avenir et de susciter de la recherche collaborative sur le sujet des transitions. Avec en particulier deux tables rondes de haute tenue (voir #OIC19 : Le numérique doit se mobiliser pour accélérer les transitions). La première, sous l’angle de l’engagement des entreprises, permettait de découvrir comment l’équipementier Groupe Lacroix intègre l’écoconception dans son usine d’électronique du futur, comment le distributeur d’énergie GRT Gaz transforme son modèle d’entreprise pour prendre en compte les énergies renouvelables dont la production de biométhane, comment l’Institut du numérique responsable, grâce à un label, guide les entreprises et organisations dans la mise en place d’une démarche de numérique responsable, enfin comment le livre blanc Numérique et Environnement, avec la contribution de la FING inspire cette démarche vers plus de responsabilité par une série de chantiers et propositions. La deuxième table ronde, orientée solutions, mêlait projets de recherche et entreprises innovantes pour exposer leurs avancées grâce au numérique sur l’énergie, la pollution, la biodiversité notamment.
L’open Innovation Camp 2019 se terminait par trois ateliers Emergenc’IN. Où il fut question d’IA au service de la mobilité multimodale et plus propre, de campus industriel sobre et durable grâce à la 5G, et de préservation des écosystèmes naturels grâce au numérique. Autant d’occasions de susciter des idées d’innovations et de nouvelles collaborations en résonance avec la convergence des transitions.